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Titre : | Lexpert judiciaire et lirresponsabilité pénale. Débats et controverses au cours du temps et questions contemporaines (2022) |
Auteurs : | Marc Schweitzer, Auteur ; Nielle Puig-Verges, Auteur |
Type de document : | Article |
Dans : | Annales médico-psychologiques (Vol. 180, n° 10, Décembre 2022) |
Article en page(s) : | p. 1059-1068 |
Note générale : | Doi : 10.1016/j.amp.2022.10.014 |
Langues: | Français |
Descripteurs : |
HE Vinci Expertise judiciaire ; Législation française ; Maladie mentale ; Responsabilité pénale |
Mots-clés: | Article 64 ; Article 122-1 |
Résumé : |
Introduction Depuis la création de la Société Médico-Psychologique (SMP), une accumulation de discussions au niveau national a entraîné des modifications législatives concernant les personnes atteintes de troubles psychiques. Les opinions publiques sont maintenant devenues parties prenantes, nous incitant, en tant quexperts judiciaires, à traiter de lirresponsabilité pénale. Les auteurs souhaitent rendre compte de lévolution des idées et des pratiques professionnelles de laliénisme et de la psychiatrie légale concernant la responsabilité et lirresponsabilité pénales et les évolutions législatives. Méthodologie Pour cela, ils sappuient sur leur exercice de lexpertise judiciaire psychiatrique et médico-psychologique, effective depuis de nombreuses années et toujours actuelle, ainsi que sur leurs activités de recherche cliniques et théoriques. La méthodologie repose sur lanalyse du langage et lapproche critique de lépistémologie historique et clinique. Les questions médico-légales Elles sont examinées en tenant compte du contexte culturel et scientifique du milieu du XIXe siècle au début du XXIe siècle. Responsabilité pénale et irresponsabilité sont des principes anciens codifiés dans le droit romain par Marc-Aurèle et évoluant avec les conjonctures politiques, sociales et religieuses de chaque époque. Que le motif invoqué pour reconnaître lirresponsabilité pénale soit désigné par les termes folie, dégénérescence, aliénation mentale, démence ou anomalie psychique ou discernement, il a toujours été lobjet de recherches chez les médecins, les aliénistes, puis les psychiatres. Les auteurs analysent le rôle de la diffusion des débats à partir de la création des Annales Médico-Psychologiques (en 1843) et de la SMP (en 1852), les illustrant par quelques cas célèbres dans la littérature spécialisée. Limportance des discussions médico-légales à la SMP a animé la fin du XIXe siècle et la première partie du XXe siècle, contribuant à enrichir la séméiologie psychiatrique et à ouvrir de nouvelles recherches, notamment méthodologiques. Ceci entraînera une évolution des conceptions relatives à ce qui induit lacte criminel et ne limitera plus lirresponsabilité à un diagnostic aliénation mentale ou de démence ; létude du fonctionnement psychique sera mise en avant avec la notion de discernement et celles demprise et de contrôle des actes. Si de nombreux débats théoriques internes à la profession ont alimenté « les querelles dexperts » disqualifiant parfois le rôle des experts, ceux-ci restaient cependant dans le champ médical et judiciaire. Depuis une dizaine dannées, ces problématiques se sont élargies à des débats sociétaux articulés autour de questions liées à la dangerosité et à la récidive. Ceci est devenu une dominante dans les réunions scientifiques, avant lirruption dans le champ pénal, de la place croissante occupée par les victimes et les associations de victimes. La loi n° 92-683 du 22 juillet 1992 a introduit dans le code pénal larticle 122-1 (Code pénal de 1994) en remplacement de larticle 64, en insérant les notions daltération ou dabolition du discernement . Cette distinction a suscité des difficultés nouvelles et des tensions dans la pratique expertale ; la loi est entrée en application en 1994. Au cours des années 2000, une série dhomicides médiatisés, impliquant des personnes présentant de graves troubles psychiques, actes effectués parfois en situation de récidive, ont défrayé la chronique en France. Il sen est suivi un mouvement dopinion qui aboutira à la loi du 25 février 2008 sur lirresponsabilité pénale. La loi mettait fin au non-lieu judiciaire pour cause dirresponsabilité pénale, en introduisant dautres dispositions sous forme des mesures de sûreté (surveillance judiciaire et rétention de sûreté). Cette loi crée de nouvelles interférences entre des questions juridiques de procédure et la pratique psychiatrique ; elle accentuait aussi limportance du rôle des experts en créant de nouvelles missions, notamment lexpertise de dangerosité. Le mouvement lié à la prise en compte de la place des victimes sest accentué, tant par lobjectif dobtenir un jugement pour lauteur des faits, que par la sollicitation de sa participation dans les phases successives de la procédure. Nous sommes récemment passés à des interrogations et des controverses sur lirresponsabilité aboutissant à la loi du 24 janvier 2022. Lactuel article 122 ne précisait pas lorigine du trouble psychique causant labolition du discernement, ce qui a été analysé par le ministre de la Justice comme « un vide juridique », quil fallait « combler durgence ». Le Titre I indique « Dispositions limitant lirresponsabilité pénale en cas de trouble mental résultant dune intoxication volontaire aux substances psycho-actives ». Lensemble de ces nouvelles dispositions, ainsi que la création de nouvelles incriminations et qualifications, ouvrent certes des débats entre magistrats et experts, elles sinscrivent surtout dans une préoccupation des pouvoirs publics à propos de la nécessité de mise en place des « dispositions limitant lirresponsabilité pénale en cas de trouble mental . Linterprétation de la contribution de la loi devant un acte criminel demeure complexe, selon les auteurs, sur le plan de la recherche psychopathologique et étiopathogénique. Dans le cadre de la pratique expertale, cette nouvelle loi rendra nécessaire ladjonction de nouvelles questions aux missions actuelles, il ne peut en résulter quune complexification de ces missions et un risque de confusions dans les réponses. Conclusion Les auteurs montrent que la question de la responsabilité pénale ne mobilise pas les mêmes interrogations et problématiques dans le champ judiciaire (le point de vue de lexpert judiciaire psychiatre, lors de lactivité expertale) ou dans le champ sociétal avec la confrontation à lensemble des représentations qui sattachent tant à la folie quau passage à lacte criminel, ce qui, depuis le début du XXe siècle, fait intervenir dautres disciplines émergentes. De leur point de vue, laffirmation quun trouble psychique dune sévérité telle quelle entraîne chez lauteur dun fait criminel, un retentissement sur son libre arbitre et son discernement au moment des faits incriminés, doit rester du domaine de la psychiatrie, même si la nouvelle loi du 24 janvier 2022, par plusieurs de ces dispositions, tentait de mettre un terme à cette nécessité. |
Disponible en ligne : | Oui |
En ligne : | https://login.ezproxy.vinci.be/login?url=https://www.em-premium.com/article/1557512 |